Alain Liberty a présenté les 21 propositions du SIRTI qui seront remises à la commission parlementaire
"Nous, on croit à la radio plus que jamais". Le Président du SIRTI Alain Liberty a présenté ce jeudi matin les 21 propositions du syndicat des radios indépendantes, réunissant 169 stations, pour la future réforme de l’audiovisuel. Il a rappelé la résistance du média face au digital, comme aucun autre. "La radio est celui dont les Français ont le plus confiance". a-t-il rappelé. Ces nombreux mesures seront présentées le 31 mai prochain devant la commission parlementaire en charge de préparer cette nouvelle loi sur l’audiovisuel, attendue pour la fin de l'année, "dont la précédente date de 1986" a rappelé Alain Liberty, puis au ministère de la Culture et de la Communication au début du mois de juin.
Crédit d'impôt pour le DAB, protection du terme "radio"
Parmi les 21 mesures, proposées, plusieurs sont plutôt innovantes, comme un accès garanti à l'hertzien, seul moyen permettant une réelle protection des données, notamment en lançant un crédit d’impôt pour accompagner le déploiement de la radio numérique (DAB+), comme ce fût le cas lors de l’arrivée de la TNT où une aide à l’équipement avait été débloqué pour les ménages les plus modestes. Le SIRTI demande également la protection juridique de l’appellation "radio" face au digital qui utilise, parfois à tort, le terme "radio". Par exemple, le service Carplay d’Apple qui embarque en voiture son application « radio » alors qu’aucune vraie radio n'y est réellement disponible. "La radio est un programme linéaire qu’on ne peut pas zapper comme une playlist" explique Alain Liberty.
Le syndicat demande que la loi définisse ce qu’est une radio indépendante et demande la garantie de l’accès au marché local. "À Marseille, deuxième ville de France, il n’y a qu’une seule radio de catégorie B". Autre mesure demandée, la facilitation dans la syndication des programmes entre radios indépendantes "ce qui semble être la voie ouverte par le CSA, sans que cela soit précisé dans la loi" souligne Alain Liberty. Sur la musique, le SIRTI demande une réelle concertation avec l’industrie musicale et une réforme du système de quotas francophones "devenu obsolète".
C’est pour le service public, et notamment Radio France, que le SIRTI est le plus énergique dans ses propositions. Il demande la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, une véritable mesure de qualité parallèle à la mesure d’audience, un contrôle des préemptions des fréquences car "sur certaines zones, le service public a plusieurs fréquences pour le même programme" et la réforme de la gouvernance des sociétés du service public. Il demande, notamment, une présence des radios privées au sein des conseils d’administration.
Les 21 propositions du SIRTI, en détail
Ce document de 40 pages sera présenté à la commission parlementaire fin mai
Remédier aux distorsions de concurrence entre les médias audiovisuels et les acteurs numériques
1. Garantir l’accès à la radio hertzienne, libre, gratuite et anonyme en adoptant une puce FM/DAB+ dans les smartphones
2. Préserver le financement des médias traditionnels en refusant l’assouplissement des règles publicitaires
3. Accompagner le déploiement de la radio numérique (DAB+) par un crédit d’impôt
4. Garantir la présence de la radio hertzienne dans l’automobile
Adapter la législation audiovisuelle à un environnement en perpétuelle évolution
5. Créer un code de l’audiovisuel
6. Protéger juridiquement la dénomination « radio » et ses caractéristiques
7. Rendre plus efficaces les mentions légales à la radio
8. Simplifier les procédures liées aux autorisations d’émettre
Reconnaitre le rôle des radios indépendantes et assurer leur protection
9. Inscrire dans la loi le rôle majeur des radios indépendantes, et leur assurer une pleine place dans l’univers hertzien
10. Faciliter la syndication de programmes entre radios indépendantes
11. Assurer aux radios diffusant un programme local l’accès au marché publicitaire local
12. Moderniser les conditions de présence locale des radios
Trouver un nouvel équilibre entre l’industrie musicale et les radios
13. Soutenir la chanson et la production française en réformant un système de quotas, devenu obsolète
14. Créer un indicateur lié au dispositif des quotas francophones pour valoriser l’apport de l’exposition de la musique sur les radios,
15. Reconnaître et rendre effectif les droits de propriété intellectuelle dont bénéficient les radios
16. Étendre le champ de la licence légale pour un meilleur accès du public aux contenus radiophoniques
Mission, financement, développement… quelles ambitions pour le service public audiovisuel ?
17. Supprimer le financement du service public par la publicité commerciale, et notamment pour Radio France
18. Imposer à Radio France des critères de mesure de qualité de service public et non d’audience
19. Mieux encadrer les préemptions de fréquences de Radio France
20. Limiter et encadrer les changements de formats des antennes de Radio France
21. Réformer la gouvernance de l’audiovisuel public
Zoom sur 5 propositions jugées prioritaires par le SIRTI
1. Garantir l’accès à la radio hertzienne, libre, gratuite et anonyme en adoptant une puce FM et DAB+ dans les smartphones
9 Français sur 10[1] manifestent un attachement très fort à la radio hertzienne et estiment que son accès est un droit universel. Afin de préserver le pluralisme des opérateurs, la diffusion broadcast de la radio hertzienne (FM et DAB+), gratuite et anonyme pour les auditeurs, doit donc être garantie. Pour 90% des Français, les pouvoirs publics doivent d’ailleurs s’engager pour garantir son accès dans toutes les situations, notamment en mobilité (qui représente 83% de l’écoute, en voiture essentiellement, puis dans les transports en commun).
Le SIRTI a identifié une mesure simple et peu coûteuse, que d’autres pays ont déjà mis en place notamment après des catastrophes naturelles de grande ampleur : l’activation d’une puce de réception de la radio hertzienne dans les smartphones. Cela simplifierait l’accès à la radio en FM et DAB+ même en cas de saturation ou d’effondrement des réseaux mobiles de télécommunication, et engendrerait un gain en batterie et en bande passante pour les auditeurs.
2. Accompagner le déploiement de la radio numérique (DAB+) par un crédit d’impôt
Face à la saturation de la bande FM et à la concurrence de plus en plus forte des acteurs numériques, le DAB+ (radio numérique terrestre/RNT) est une alternative technologique à l’offre non régulée des GAFAs. Il permet à la France de conserver un écosystème radiophonique dynamique indépendant, régulé, d’assurer la transition numérique de la radio et d’ouvrir des opportunités de développement. L’État doit s’engager dans la radio numérique terrestre comme il l’a fait pour la TNT en organisant, par exemple, de vastes campagnes d’information du public.
Le SIRTI suggère également la mise en place d’un crédit d’impôt radiophonique en faveur du DAB+. Ce crédit d’impôt permettrait aux entreprises d'alléger les coûts liés au lancement d’une offre en DAB+ et/ou de pallier les doubles coûts de diffusion (FM et DAB+).
3. Inscrire dans la loi le rôle majeur des radios indépendantes, et leur assurer une pleine place dans l’univers hertzien
Avec 9 millions d’auditeurs quotidiens, les radios indépendantes jouent un rôle essentiel dans le paysage audiovisuel français. Le SIRTI plaide pour que la loi inscrive très clairement le rôle et les particularités des radios indépendantes, tout comme le soutien des pouvoirs publics à un paysage radiophonique indépendant et pluraliste, ancré dans les territoires. Cette inscription participera au respect du juste équilibre dans l’attribution des fréquences hertziennes, mais également à l’unité et à la force d’un secteur d’activité qui a su depuis 30 ans séduire les Français en répondant à leurs attentes.
4. Soutenir la chanson et la production française en réformant un système de quotas devenu obsolète
La musique est la première motivation d’écoute de la radio en France, devant l’information. La radio est de loin le premier prescripteur de nouveaux talents. La loi actuelle met en danger les radios en leur imposant des contraintes devenues insupportables face à un monde numérique déréglementé. En méconnaissant l’évolution des usages, le risque de fuite du public de la radio vers un streaming affranchi de toute régulation est majeur. Les évolutions de la loi doivent se faire par la voie de la concertation professionnelle entre l’industrie musicale et les radios. Cela pourrait se traduire par différentes mesures :
• L’application du régime des quotas aux plateformes de musique en ligne, notamment pour leur offre gratuite.
• La mise en œuvre d’un critère de production francophone, qui complèterait le critère de diffusion francophone et permettrait de pallier la chute de la production d’expression francophone.
• La prise en compte des formats spécifiques (radios thématiques, communautaires, locales…).
• L’instauration d’un quota effectif de chanson d’expression francophone pour les radios du service public.
5. Reconnaître et rendre effectif les droits de propriété intellectuelle dont bénéficient les radios
Les programmes radiophoniques peuvent être protégés par la propriété intellectuelle. Les radios pourraient en effet revendiquer des droits d’auteur et des droits voisins sur leurs programmes, pour autoriser ou non leur diffusion sur les supports digitaux notamment. Ces droits (droits d’auteurs, droits voisins, droit de copie privée), qui n’ont jamais été exercés, doivent être reconnus et mis en œuvre. Revendiquer aujourd’hui ces droits est primordial quand les programmes radiophoniques sont de plus en plus reproduits, copiés ou diffusés, souvent de manière illégale sans l’autorisation de leurs propriétaires.