Et l’auditeur dans tout cela ?

Rédigé par Claude Hemmer le Mardi 24 Novembre 2015 à 08:20 | modifié le Mardi 24 Novembre 2015 à [HEURE]



Bien évidemment les thèses développées dans ce qui suit s’en trouvent d’autant renforcées d’abord par l’actualité dramatique de ces derniers jours et la tragédie vécue mais ensuite, de façon plus anecdotique eu égard au contexte, par la parution des premiers résultats des Médiamétrie de la rentrée radio 2015, véritable bulletin scolaire des patrons, directeur ou responsable des programmes des principales radios diffusant sur notre territoire.


Claude Hemmer évoque ce que l'on appelle l'infobésité : "la surcharge d'informations"
Je me contenterai de n’évoquer que la dérive constatée au coeur du médium radio, même s’il est vrai que la tendance lourde d’une information dominante, omnipotente, omniprésente trouve ses ferments dans les programmes télévisuelles des chaines dites « d’info continu » que sont aujourd’hui BFMTV, ITélé et LCI (pour ne citer que les chaines privées nationales).
En radio, comme dans bien d’autres activités ou tendances nous assistons à « des mouvements de balancier », à des modes qui se succèdent, souvent opposées ou contraires. La construction des programmes d’une radio – c'est-à-dire du contenu, de ce qui fait le menu d’une grille d’antenne – devrait pourtant respecter ce que l’on appelle des fondamentaux (équivalent des ingrédients nécessaires à la réussite d’une recette culinaire).

Uniformisation des antennes

Aujourd’hui même, nous assistons à l’uniformisation des antennes au « bénéfice unique » de l’information et d’une course effrénée derrière une info nouvelle, inédite qui n’arrive in fine qu’après 3 ou 4 heures d’un long pathos et une réitération sans fin des mêmes éléments.
La radio dite généraliste devient une mono thématique et la radio thématique se bat pour conserver difficilement sa spécificité. Le CSA, gardien du respect des formats, des règles de diffusion n’y voit pas malice et le danger d’une dérive lente mais inexorable de la généraliste vers la station majoritairement tournée vers l’information s’amplifie .Ce mal, telle l’hydre, prend l’allure d’uniformité, de « panurgisme », de pâle copie, de banalité et d’uène Infobésité* amplifiée par la multiplication des canaux ou supports, relais d’Information, que sont les tablette, smartphone, ordinateur ! Je ne passerai pas sous silence les risques considérables de dérives encourus par « Le MÉDIA » en général que cette course « à la dernière info exclusive » représente !

Un changement de comportement

Les nouvelles technologies épousées et imposées par tout médium modifient profondément le comportement de l’auditeur qui tend à devenir un visio’diteur informé en temps réel à travers, le poste de radio traditionnelle et maintenant de façon exponentielle par les alertes permanentes reçues sur les différents terminaux. Ne sommes-nous pas entrain de couper la branche sur laquelle nos médias audiovisuels étaient confortablement assis ? N’attend pas l’info elle est déjà arrivée à toi !
Que l’on ne me fasse pas de faux procès en me répliquant que « la radio a changé » « qu’il faut que je m’adapte » « qu’il faut donner à l’auditeur ce qu’il demande » ! Justement l’auditeur que veut-il ? Eh bien parlons-en ! Écoutons-le un instant et prenons le temps d’analyser les chiffres du Médiamétrie de Septembre/octobre 2015. Que disent-ils ? Premier round : les vainqueurs, sont les musicales ! En face les généralistes stagnent ou accusent une tendance baissière comme RMC et France Info, particulièrement !
Comme me le disait hier encore un fidèle de France Bleu Haute Normandie, « Bien sûr que nous sommes consternés par ce qu’il se passe à Paris, mais croyez-vous que même NOTRE radio a besoin de se mettre à l’unisson de France Info, d’Inter, RTL ou Europe 1? Vous savez, si nous voulons de « l’info de Paris » nous savons où aller la chercher ».
Enfin, comme nous le faisions jadis, lorsque des évènements tragiques survenaient, nous avions à coeur de modifier la liste de diffusion des titres musicaux, de supprimer dans un premier temps les écrans publicitaires, puis d’écouter un à un le contenu des pubs pour être certain que rien ne puisse choquer . Nous recherchions sans cesse le bon équilibre et n’hésitions pas à l’extrême limite à « Casser l’antenne ».

Casser son antenne ?

Non ne nous y trompons pas, casser de fond en comble - et de manière prolongée une grille d’antenne, en y laissant que l’Information répond d’abord et avant tout à une logique comptable certainement pas financière au contraire (la suppression - de bon aloi - totale ou partielle de la pub est un manque à gagner ) mais comptable au regard de l’audience ! Je suis prêt à prendre les paris sur la prochaine vague Médiamétrie de janvier, l’information des évènements multi diffusée par chacune des stations ne modifiera guère le classement des « généralo-thématiques » sauf peut-être pour France Info et ses journalistes - dont la mission première est d’INFORMER – qui mériteraient de meilleurs chiffres.


Ce qui ne sous-entend absolument pas que l’ensemble de la classe journalistique Radio et Télévision ne se voit pas saluer individuellement par un ENORME coup de Chapeau ; et ce pour le travail ininterrompu fournit depuis vendredi dans le seul but de nous INFORMER. M C’est aussi cela le métier de journaliste, qu’il soit pratiqué au coin de la rue ou au bout du monde !
Voilà pourquoi il est nécessaire de lancer une réfléxion sur ce thème en respectant l’avis de chacun, mais sans s’abstenir de poser les bonnes questions dans un seul et unique objectif : donner à l’auditeur le choix du programme qu’il souhaite entendre dans sa radio, son ordi, son smartphone etc.

*L'infobésité est issue de la contraction entre les termes "information" et "obésité". Elle désigne la surcharge d'informations à laquelle nous sommes tous les jours confrontés.

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